La responsabilité juridique des entreprises en matière de cybersécurité

La cybersécurité est devenue un enjeu majeur pour les entreprises, tant en termes de protection des données que de respect des réglementations en vigueur. Dans cet article, nous aborderons les aspects juridiques liés à la responsabilité des entreprises face aux risques informatiques, et proposerons des conseils pour limiter leur exposition.

Le cadre légal et réglementaire de la cybersécurité

En France, plusieurs textes législatifs et réglementaires encadrent la question de la cybersécurité et imposent aux entreprises certaines obligations en matière de protection des données personnelles. Parmi les principaux dispositifs figurent :

  • Le Règlement général sur la protection des données (RGPD), applicable depuis mai 2018, qui renforce les droits des personnes concernées par le traitement de leurs données personnelles et impose aux entreprises de mettre en place des mesures techniques et organisationnelles pour assurer leur protection.
  • La loi Informatique et Libertés, modifiée par l’ordonnance du 12 décembre 2018, qui définit les obligations des responsables de traitement ainsi que les sanctions encourues en cas de manquement.
  • La directive NIS (Network and Information System), transposée en droit français par l’ordonnance du 22 janvier 2019, qui vise à améliorer la sécurité des réseaux informatiques au sein de l’Union européenne et s’applique aux opérateurs de services essentiels (OSE) et aux fournisseurs de services numériques (FSN).

La responsabilité des entreprises en cas d’incident de sécurité

En matière de cybersécurité, les entreprises peuvent voir leur responsabilité engagée sur plusieurs fondements :

  • La responsabilité contractuelle, en cas de manquement à une obligation prévue au contrat liant l’entreprise à ses clients ou partenaires. Par exemple, un prestataire informatique peut être tenu responsable si le système qu’il a mis en place n’assure pas un niveau de sécurité suffisant.
  • La responsabilité délictuelle, lorsqu’une faute commise par l’entreprise cause un préjudice à autrui. Il peut s’agir, par exemple, d’une négligence dans la mise en place des mesures de sécurité, ayant conduit à une fuite de données personnelles.
  • La responsabilité pénale, lorsque l’entreprise ou ses dirigeants sont poursuivis pour des infractions prévues par le Code pénal, telles que l’accès frauduleux à un système de traitement automatisé de données ou la violation du secret professionnel.

Il convient de noter que la responsabilité de l’entreprise peut également être engagée en cas d’attaque informatique provenant d’un tiers (hacker), dès lors qu’elle n’a pas pris les mesures nécessaires pour protéger les données dont elle est responsable.

Les sanctions encourues en cas de manquement aux obligations de cybersécurité

Les entreprises qui ne respectent pas leurs obligations en matière de cybersécurité s’exposent à des sanctions financières et pénales. Dans le cadre du RGPD, l’autorité de contrôle, en France la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), peut infliger des amendes administratives pouvant atteindre 20 millions d’euros ou 4% du chiffre d’affaires mondial annuel, selon le montant le plus élevé.

En outre, le Code pénal prévoit des peines d’amende et/ou de prison pour certaines infractions liées aux traitements informatiques des données, tels que :

  • l’accès frauduleux à un système de traitement automatisé de données (5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende) ;
  • la violation du secret professionnel (1 an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende) ;
  • le détournement de données personnelles (5 ans d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende).

Les bonnes pratiques pour limiter sa responsabilité en matière de cybersécurité

Afin de réduire les risques juridiques liés à la cybersécurité, les entreprises sont invitées à adopter les bonnes pratiques suivantes :

  • Mettre en place une politique de sécurité informatique, incluant notamment l’identification des actifs informationnels à protéger, l’évaluation des risques et l’élaboration de mesures de protection adaptées.
  • Respecter les principes du RGPD, en veillant notamment à la licéité des traitements, à la minimisation des données collectées, à leur exactitude et à leur conservation pour une durée limitée.
  • Renforcer la sensibilisation et la formation du personnel, afin que chacun puisse adopter des comportements responsables en matière de cybersécurité (gestion des mots de passe, vigilance face aux tentatives d’hameçonnage, etc.).
  • Mettre en place un plan de réponse aux incidents, permettant de détecter rapidement les failles de sécurité et d’y remédier, ainsi que d’informer les autorités compétentes et les personnes concernées le cas échéant.
  • Souscrire une assurance cyber-risques, afin de couvrir les frais liés aux incidents de sécurité (réparation des systèmes informatiques, indemnisation des victimes, etc.).

En conclusion, la cybersécurité représente un enjeu majeur pour les entreprises qui doivent faire face à des obligations légales et réglementaires croissantes. En adoptant une démarche proactive et rigoureuse en matière de protection des données, elles peuvent limiter leur exposition aux risques juridiques et financiers liés aux incidents informatiques.